Voici dessinée une histoire mêlant à la fois l’Histoire, l’amour et les sentiments ambigus tels que la jalousie et le pouvoir, en évoquant curieusement les atmosphères buňueliennes. Dans un décor magnifique et épuré, avec de belles couleurs sombres illustrant parfaitement cette tragique période de l’humanité, Carlos Saboga sait tisser les fils d’un drame inexorable dans lequel on peut lire comme en filigrane le destin du monde fait de doutes, de trahisons et d’amours pas souvent partagées. « Un univers en clair-obscur, comme l’écrit le scénariste-réalisateur lui-même dans sa note d’intention, où seuls les bruits extérieurs font parvenir des échos sporadiques de la vie urbaine et, à travers la radio et les bribes de la bande sonore des actualités du cinéma voisin, le fracas de la guerre qui se poursuit ailleurs. » On pense bien sûr ici à Une journée particulière d’Ettore Scola (1977), dans lequel le brouhaha du speaker qui commente la rencontre entre Mussolini et Hitler entre même par les fenêtres de l’appartement, comme si la guerre, ce monstre avide de sang et de mort, s’imposait à nous par tous les moyens et pourrissait les relations humaines dans ses moindres détails et même dans des lieux qui s’en veulent détachés, avec la même force que dans les tragédies grecques des Atrides où la mort et la guerre ont un visage, celui de la fatalité. En effet, À une heure incertaine parvient avec maestria à nous montrer le drame de ces personnes qui tentent d’échapper qui à la déportation, qui à leur classe sociale, qui à la guerre mondiale tout en ne voulant jamais abandonner leurs prérogatives ou leur petit pouvoir. Remarquable.
A une heure incertaine
Article écrit par Jean-Max Méjean

Entre reconstitution historique et drame, ce deuxième film de Carlos Saboga impose un réel style.