En effet, la démarche est étonnante car, avec une bonne soixantaine d’heures de rushes, Émilie Brisavoine trouve finalement un producteur qui lui présente une monteuse, Karen Benainous, qui l’aidera à mettre en forme le projet. En fait le film prend corps au montage, comme souvent et, de cette matière informe, naît une histoire qu’elle décide de clarifier en introduisant des cartons illustrés qui structurent un peu la narration décousue due au genre vidéo-portrait. Le film commence donc par un carton introductif qui donne le ton du film : « Ça commence comme un conte de fées : il y a une reine, un roi et leurs beaux enfants, Pauline, Anaïs et Guillaume. Mais c’est un peu plus compliqué que ça en fait… »

Du coup, les parents et leurs enfants deviennent des personnages d’une drôle d’histoire, comique et triste à la fois, même si la narratrice, comme tout bon marionnettiste, reste invisible – on entend seulement sa voix off. La mère apparaît souvent, avec son look inoubliable même si elle ne semble pas trop goûter la caméra, le (beau)-père en héros des temps modernes, homosexuel provocateur et bon père de famille. Les deux cadets, Anaïs et Guillaume, sont moins présents sauf pour éclairer un point commun ou un litige. C’est la semi-sœur d’Émilie Brisavoine qui crève surtout l’écran. En effet, Pauline a une présence folle et ce ne serait pas étonnant qu’on la retrouve bientôt dans des films de fiction. Son naturel et son charme, sans oublier sa photogénie, émouvraient le spectateur le plus endurci.
Pauline s’arrache, qui sort en décembre en ces temps meurtris, va sans doute cartonner et pas seulement dans les colonnes critiques des magazines, mais surtout dans le cœur des spectateurs qui y retrouveront tous le miroir à peine déformant de leur propre histoire familiale, pleine d’humour, de tendresse, de cruauté et de poésie. En fait tout ce qui manque à notre cinéma un peu à court d’imagination.