Un succès de plus
Né à Jérusalem en 1954 et grandi entre Montréal, New York, New Haven, Rio de Janeiro et Beer Sheba, Eran Riklis travaille dans le cinéma depuis l’âge de 13 ans et, plus précisément, depuis ses 21 ans car c’est à cette époque qu’il a étudié le cinéma à l’université de Tel Aviv, puis à la National Film School de Beaconsfield, en Angleterre. Randle McMurphy, protagoniste de Vol au-dessus d’un nid de coucou lui a toujours servi de repère moral, et plusieurs cinéastes l’ont marqué comme Renoir, Kurosawa, Antonioni, Tarkovski, etc. On peut dire qu’il a su faire de ces influences une force et une dynamique puisque, à 70 ans, Eran Riklis est à la tête d’une bonne quinzaine de longs-métrages dont certains ont eu un grand succès comme La fiancée syrienne en 2004, Les citronniers en 2008 et Le dossier Mona Lisa en 2017 pour ne citer qu’eux.
Les déçus de la révolution
Cette année, il nous livre un nouveau film important sur les désenchantements des Iraniens exilés qui retournent au pays juste après l’arrivée au pouvoir de l’ayatollah Khomeiny et puis, après, sur les manières de combattre l’obscurantisme sur place. Bien sûr, il n’a pas reçu l’autorisation de filmer en Iran et c’est la première fois qu’il tourne un film intégralement en Italie, en utilisant des villes et des paysages qui évoquent parfaitement l’Iran, et en travaillant avec des équipes créatives et techniques italiennes, des financements italiens et des producteurs italiens qui lui ont procuré tout ce dont il avait besoin. On découvre en effet, parmi les producteurs, les noms de Marica Stocchi et Gianluca Curti. Inspiré du roman autobiographique et éponyme d’Azar Nafisi, le film raconte son histoire qui est celle d’une professeur d’université revenue à Teheran à la fin des années 1970 et qui se retrouve alors dans l’impossibilité d’enseigner la littérature telle qu’elle le faisait en Amérique. L’écrivain, interprétée à l’écran par la magnifique Golshifteh Farahani, va trouver comme moyen de combattre de réunir sept de ses étudiantes pour lire des classiques de la littérature occidentale interdits par le régime et, notamment bien sûr le célèbre et révolutionnaire roman de Nabokov qui va donner son titre au film et quel titre !
Alors que les fondamentalistes sont au pouvoir, ces femmes se retrouvent ainsi, retirent leur voile et discutent de leurs espoirs, de leurs amours et de leur place dans une société de plus en plus oppressive. Pour elles, lire Lolita à Téhéran, c’est célébrer le pouvoir libérateur de la littérature.
Combattre qu’on soit israélien ou iranien
On laissera la parole au réalisateur lui-même, le plus indiqué pour parler de ses intentions développées dans le dossier de presse du film et, plus exactement, dans sa note d’intention : « Les réalisateurs, qui sont des conteurs, sont toujours à mi-chemin de la vérité et du mensonge, de la vie et de la mort. Qu’on soit Israélien ou Iranien, on s’intéresse constamment à des récits qui valorisent le courage et l’héroïsme, mais qui, désormais, sont envisagés avec doute et scepticisme. On ne s’attarde que sur les brèches dans le mur. On remarque les traits creusés et le visage fatigué de ces hommes et de ces femmes qui ont sacrifié leur vie pour leur peuple et leur pays – et qui, malgré tout, ont été abandonnés dans le froid, ou pire encore, jusqu’à ce qu’ils trouvent la force de se battre, refusant d’abdiquer leur intégrité et leur espoir de changement. »
Pour le visuel, cliquez ici : https://www.youtube.com/watch?v=CWLLoxwBVjo