Ce film, réalisé en improvisation à partir d’un texte de théâtre écrit par Alina Grigore, qui interprète Sasha, la sœur jumelle dans le film, est d’une puissance intense qui tient le spectateur en haleine jusqu’à la fin. On peut se demander pourtant ce qui justifie le titre français, traduction exacte du titre roumain Illigetim : qu’est-ce qui est illégitime dans cette histoire familiale ? L’enfant qui naîtra de l’inceste, le rôle du père, la morale du film qui évolue vers un grinçant happy end au contraire d’une fin qui aurait pu être inspirée du mythe grec des Atrides ? La fin est déjà très inquiétante et mériterait discussion, surtout que le film se termine par une photo de famille presque élargie, avec, à l’écart, la fille aînée, Ema, qui semble jeter sur cette histoire un œil désapprobateur qui pourrait faire penser à la possibilité d’une suite.

Magnifique réflexion sur l’amour et la paternité, ce film basé sur le travail d’improvisation est d’une grande force qui justifie le prix CICAE obtenu au Forum du festival de Berlin 2016. De plus, il offre une base de réflexion et d’inspiration par la méthode de travail qui a été choisie et qu’Adrian Sitaru explique dans le dossier de presse : « Les acteurs avaient donc ici des objectifs précis chaque jour, mais personne ne savait comment une scène finirait, et nous ne faisions qu’une seule prise pour chaque scène. Je souhaitais faire un film très proche du documentaire d’observation, mais qui soit également une fiction, un film hybride. Le montage a d’ailleurs été proche de celui d’un documentaire. Après douze jours de tournage, nous avions dix heures d’images enregistrées. Et j’ai d’abord laissé le monteur chercher et trouver sa propre histoire dans ce qui avait été tourné, avant de véritablement travailler ensemble. »