« C’est pas vraiment un truc que tu gères, c’est vraiment au feeling ». Tirée de Et toi, t’es sur qui ?, le premier film de Lola Doillon sélectionné à Cannes dans la catégorie Un certain regard en 2007, cette réplique pourrait aussi se retrouver dans Contre toi, son second long-métrage. Avec cette phrase, Julie, 15 ans, essayait d’expliquer sa première expérience sexuelle à sa copine Elodie. Dans Contre toi, d’un souffle, elle pourrait être haletée par Anna (Kristin Scott Thomas), gynécologue obstétricienne tentant vainement (?) de justifier ses émois, ses faiblesses, ses égarements face à son ravisseur, Yann (Pio Marmaï), qui la tient pour responsable du décès de sa femme lors de son accouchement.

En apparence, c’est vrai, tout oppose ces deux films. La fraîcheur, la flexibilité et l’insouciance des adolescents en proie à leurs premiers troubles sexuels et amoureux contrastant cruellement avec la monotonie, l’expérience et les réalités de la vie d’adulte de ces deux êtres fanés, l’un par la douleur de la perte, l’autre par la solitude. Mais la notion de huis-clos est bien commune. Clairement matérialisé dans Contre toi, via la pièce où est séquestrée Anna, puis psychologiquement par l’incapacité de cette dernière à penser à autre chose qu’à son ravisseur, le huis-clos n’en était pas moins réel dans Et toi, t’es sur qui ?, où l’adolescence tournait de toute façon en vase clos. Aucun besoin de limitation géographique ou autre, les parents, professeurs, adultes de manière générale étant quasiment privés d’écran dans ce film, comme absents de la vie rêvée de leur progéniture.
Mais, dans un cas comme dans l’autre, qui dit huis-clos ne dit pas étouffement. Pas pour le spectateur du moins : Lola Doillon ne nous étouffe pas plus cette année qu’en 2007, bien qu’une grande partie de Contre toi se déroule dans une pièce close aux murs sales (la caméra ne quittant pas Kristin Scott-Thomas d’une semelle, enfermée tout comme en apparence le spectateur).