Un premier long-métrage prometteur
On n’est jamais déçu devant un film iranien. Cette nouvelle réalisation ne fera pas mentir cet adage, loin de là. Coproduite par l’Iran, la France et les Pays-Bas, c’est sûr qu’elle ne sera pas appréciée en Iran encore une fois, puisqu’elle ternit l’image du pays à divers titres. Les deux jeunes réalisateurs, basée pour l’une à New York et l’autre à Paris, n’ont pour le moment réalisé que des courts et, pourtant, Au pays de nos frères , leur premier long-métrage, vient de remporter le prix de la mise en scène du festival du film de Sundance. Il le mérite amplement par sa direction d’acteurs, sa lumière et sa photographie de Farshad Mohammadi, sur le propre scénario des deux réalisateurs. Le film se passe en Iran dans les années 2000 : dans l’ombre de l’invasion américaine, une famille élargie de réfugiés afghans tente de reconstruire sa vie dans « le pays des frères » . Une odyssée sur trois décennies où Mohammad, un jeune étudiant prometteur, Leila, une femme isolée et Qasem qui porte le poids du sacrifice pour sa famille, luttent pour survivre à ce nouveau quotidien incertain.
Dégradation et indifférence
Pourtant, l’accueil dans ce pays frère, avec la même religion et semblablement les mêmes coutumes aurait dû être facilité. Hélas, il en va de même de l’Iran comme de tous les autres pays, à douter profondément de l’âme humaine en général. C’est pour l’avoir vécu à l’intérieur de leur propre pays, en observant la manière dont leurs concitoyens ont accueillis ces réfugiés, que les deux réalisateurs ont eu envie de faire ce film comme constat et dénonciation, ainsi qu’ils le déclarent dans le dossier de presse du film : « Nous avons des amis afghans et avons pu constater au fil des années à quel point celle-ci s’est détériorée, dans l’indifférence de la société iranienne autant que de la communauté internationale. Notre but premier était donc de la mettre en lumière. »
Une photo adaptée à la tristesse
Et bien sûr c’est un film d’une grande tristesse, un constat de l’intégration sous toutes les latitudes qui presque nous permettre de moins culpabiliser sur la manière dont la France accueille aussi ses migrants. Alireaa Ghasemi confie à son tour dans le dossier de presse que cette tristesse a orienté à sa demande les orientations esthétiques du directeur de la photographe qui ne voulait pas ajouter de la tristesse à la tristesse. « Il nous a convaincu par une remarque lors de la préparation en nous disant qu’il trouvait que l’histoire de cette famille était si triste qu’il était nécessaire de la filmer de la plus belle manière possible. Cela s’est concrétisé par des changements de cadres, de durée de plans ou de paysages entre les différents chapitres, amenant une progression, comme par exemple celle entre les images hivernales du premier chapitre et celle plus printanières du second. » Un très beau premier long-métrage avec des acteurs magnifiques et très expressifs qui montrent une image digne du peuple afghan, de ses coutumes, de ses costumes bien loin de ce que nous rapportent les médias à juste titre sur le régime des talibans.