The Witch

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Film d´horreur assez quelconque qui vaut pour ses interprètes et certains détails de mise en scène.

Nouvelle-Angleterre au XVIIème siècle, période ouverte à la chasse aux sorcières et autres satanismes. Dans ce film de Robert Eggers remarqué au Festival de Sundance, une famille de cinq enfants rythme son quotidien dans une ferme en lisière d’une forêt entre le labeur à réaliser pour vivre et leur dévouement à Dieu. Jusqu’au jour où le dernier né, Samuel, disparaît, presque sous les yeux de la fille aînée, Thomasin, chargée de le surveiller. Les disparitions s’ensuivent alors qu’une malédiction semble s’abattre sur la famille et provoquer tout un ensemble de dérèglements. Le « Mal » se répand donc et les traits qu’il prend, ainsi que l’environnement dans lequel il se déploie, ne révolutionne pas le genre : une fois encore la forêt, avec ses grands arbres et son atmosphère sombre, devient le lieu propice au déploiement d’un récit inquétant. De même, les manifestations de l’horreur prennent notamment les traits d’un corps en décomposition, auparavant dissimulé derrière une chair séductrice (et forcément féminine) et s’accompagnent d’effets visuels et musicaux assez convenus et pauvres. Cet univers peu original se démarque dans sa reconstitution d’époque, son ancrage dans le monde pieux de cette famille à la vie spartiate.

Très vite, c’est un maléfice moins extérieur et étranger qui semble accabler les personnages mais bien plutôt un mauvais œil qui vient et observe de l’intérieur. Les membres de cette famille, les parents, William et Kate, et leurs enfants, deviennent les possédés d’une magie noire dont ils pourraient bien être aussi la source. A ce titre, Thomasin, la fille aînée, est celle qui incarne le mieux cette ambiguïté : l’intriguant visage d’Anya Taylor Joy, pâle avec ces grands yeux bruns, traduit ce mélange de candeur et de menace. La scène de disparition de son petit frère, dans une contre-plongée sur le visage de la jeune fille jouant à se cacher les yeux pour faire rire celui-ci illustre cette sensation de trouble, de rire nerveux, provoquant des effets bien plus malaisants que la sorcière risible aperçue dans la forêt. Robert Eggers a choisi des acteurs qui jouent avec talent cette opacité, des visages qui s’animent afin d’illustrer ce dérangement : le visage christique du père, William, l’étrangeté des deux petits jumeaux Mercy et Jonas. Cette famille forme un cercle irrespirable et contagieux, qui se nourrit d’un délire lancinant construit à partir de leur ferveur religieuse.

Le cinéaste transforme la rhétorique des croyants en la poussant à un extrême qui sert le dérèglement à l’œuvre. Quelques détails de mise en scène apportent au film son voile pernicieux et morbide : un piège laissé dans la forêt, un poussin mort dans un œuf, un bouc noir et menaçant, une chèvre qui fait couler du sang à la place de donner du lait. La malédiction gangrène cette famille que l’on voit bannie de sa communauté au début du film. Au fur et à mesure, chaque membre devient la possible incarnation du Diable aux yeux des autres, révélant l’irrationnel qui les dévore, prisonniers de croyances obscures et maladives, et ce jusqu’à la destruction des uns par les autres. Mais ce bousculement cinglé s’arrête là, demeure une posture, le cinéaste ne fait rien du monstre et précipite son film dans un final ridicule et bâclé au lieu de se saisir de toute la matière à penser qui réside derrière cette chasse à l’Autre.

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