The Last Girl – Celle qui a tous les dons

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Et si les zombies, au lieu d´apporter ruines et désolation, représentaient l´avenir d´une nouvelle humanité ?

Un énième film de zombies, pourrait-on dire en découvrant l’intrigue de The Last Girl : dans une Angleterre ravagée par un virus qui transforme la populace en hordes d’« affamés », une base scientifique tente de fabriquer un vaccin à partir d’enfants mi-humains, mi-zombies. L’originalité du film réside dans son point de vue : en se focalisant sur Melanie (Sennia Nanua), brillante jeune fille de cette deuxième génération de zombies qui ressemble en tous points aux humains, hormis sa propension à les dévorer lorsqu’elle les sent, le récit envisage l’apocalypse par les zombies non comme la destruction de l’humanité, mais comme sa potentielle régénération.

Fin d’un monde et renaissance de l’humanité

L’opposition que dessine Tom Cuisinier-Rosset, auteur de « Le cinéma post-apocalyptique. Une poétique de l’après », entre la « Fin du monde humain » et la « Fin de l’humanité », permet de mesurer l’écart entre The Last Girl et des films de zombies traditionnels. Dans ces derniers, la fin du monde correspondait à la fin de l’humanité, c’est-à-dire la fin des valeurs qui faisaient du monde un monde humain ; les humains survivants de The Last Girl, militarisés à l’excès et aveuglés par leur croyance en la science, illustrent cette tendance en se croyant les derniers dépositaires de l’humanité. Or, ce que montre le parcours initiatique de Melanie dès lors qu’elle et un petit groupe d’humains fuient le camp pris d’assaut par les affamés, c’est que la deuxième génération de zombies a fait siennes les valeurs humanistes enseignées par Miss Justineau (Gemma Arterton).

Il y a même transfert de ces valeurs. Alors que les survivants se replient dans la brutalité et la haine des autres – « Erreurs de la nature », répètent chaque matin les soldats aux enfants du camp –, ces derniers font preuve d’écoute, de curiosité et d’intelligence. Ces créatures hybrides représentent l’avenir de l’humanité, en tant qu’ensemble de valeurs culturelles indépendantes de l’espèce biologique qui les a définies.

La crise de l’anthropocentrisme

Le point de vue de Melanie, audacieuse, altruiste et égotiste, met alors en crise l’anthropocentrisme qui caractérise d’ordinaire le genre. Nombre de ses productions se révèlent alors le foyer d’une culture résolument machiste, xénophobe, aux méthodes quasi-génocidaires avec les zombies. Il faut alors prendre le terme d’« apocalypse » en son sens originel, du grec apukálupsis : « ce qui dévoile ». Un monde nouveau affranchi des soubassements malsains de l’ancien.

Pour autant, The Last Girl ne bascule pas dans un idéalisme compassionnel où l’amour et la diplomatie remplaceraient sans heurts la violence. Sans pathos aucun s’enchaînent les actions et les morts, dans une mise en scène efficace, rythmée par une musique dissonante, qui ne laisse sciemment pas de place au lyrisme, qu’il soit élégiaque ou enchanteur. C’est dans l’action, et non dans le discours, que se reconstruit une nouvelle humanité.

Faut-il voir dans The Last Girl une métaphore politique ? Le récit ne renvoie guère à l’actualité, si ce n’est la crainte de l’isolationnisme après le Brexit. Cependant, la perspective qu’il adopte sur l’apocalypse peut sans doute référer à la crise écologique actuelle, dont on sent l’écho lors des séquences dans une Londres en ruines, où se dressent à présent de magnifiques forêts. Insidieusement fait son chemin l’idée qu’il faut certes sauver le monde, mais que ce monde régénéré peut très bien se passer des humains.

Titre original : The Last Girl - Celle qui a tous les dons

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Durée : 112 mn


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