The Bubble

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En utopie et horreur, The Bubble décrit avec humanisme une romance impossible.

En dvd le 6 mars 2008
Distribué par MK2 Editions

The Bubble (la bulle), surnom donné à la ville de Tel-Aviv, a largement inspiré Eytan Fox pour son dernier film. Cocon à la fois protecteur, coupé du monde extérieur, et d’une fragilité inouïe, menaçant d’exploser à tout instant, la métropole israélienne tisse la toile de fond de The Bubble. Le réalisateur, qui se fit connaître en 2004 avec son long-métrage humaniste Tu marcheras sur l’eau, livre ici une histoire tragi-comique dans laquelle quatre jeunes pleins d’avenir vont se retrouver confrontés à la réalité d’une existence marquée par le conflit israélo-palestinien.

Ils sont trois, ils sont beaux, ils sont jeunes et vivent ensemble dans le quartier branché de Tel-Aviv. Lulu est vendeuse de produits de beauté, Noam est disquaire, et Yali tient un café. En Carrie Bradshaw israélienne, la pétillante Lulu cherche LE mec idéal, tandis que ces deux friends colocataires et homos assumés font de même. On pourrait se préparer à un énième épisode de Sex and the City si l’on ignorait que l’histoire se passe en Israël, où attentats et conflits armés avec la Palestine battent la mesure du quotidien. Leur bulle se perce le jour où Noam, qui effectue son service militaire dans un check point à Néplouse, fait la rencontre d’Ashraf, jeune Palestinien dont il tombe amoureux. La vie à quatre prend une toute autre forme, la réalité commençant à se dévoiler crescendo.

La première séquence du film rompt totalement avec celles qui suivent. Filmée à la manière d’un documentaire, dans une lumière jaunâtre, sans aucune musique de fond, cette séquence révèle la tension permanente qui régit le pays. Soldats israéliens comme civils palestiniens sont habités par l’anxiété. Les premiers sont susceptibles de tirer à tout moment, les seconds, de se faire exploser. C’est dans ce contexte que Noam rencontre Ashraf. Séquence suivante, Noam retourne à la quiétude de sa vie à Tel-Aviv. Changement radical de réalisation. Plus fonctionnelle mais aussi et surtout plus banale. La pellicule, gorgée de couleurs clinquantes, défile sur des refrains anglo-saxons. Les trois amis se retrouvent enfin. Boîtes, théâtre, cafés, rave et télévision (reality shows et séries américaines), les influences occidentales se font plus que ressentir.

Le thème de l’homosexualité est récurrent dans le cinéma d’Eytan Fox. Après Tu marcheras sur l’eau, et plus anciennement Yossi et Jagger, The Bubble relate une histoire d’amour originale et impossible, véritable hymne à la tolérance. Le personnage d’Ashraf, partagé entre sa famille ultra conservatrice et son amour pour Noam, ne cessera d’occasionner les allers-retours entre la réalité de la situation et l’artifice de la vie insouciante des jeunes gens. Pudeur et justesse deviennent les maîtres mots d’une caméra qui magnifie le couple et équilibre les inévitables clichés sur les icônes homos comme Georges Michael. Quant à la perception qui est donnée de la femme, l’ambiguïté du scénario est telle qu’entre liberté de choix et inéluctable retour du refrain « Ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants », le cœur du réalisateur balance. Toujours est-il que le monde de quasi-fiction, dans lequel sont enfermés les héros, s’articule intelligemment avec la dureté de la réalité. Eytan Fox parvient bien à transmettre sa propre perception, car comme il le suggère : «Le film à l’image de la vie de Tel-Aviv oscille en permanence entre espoir et désespoir. »

Et point de vue désespoir le spectateur est servi ! Le film y sombre progressivement sans possibilité de retour. La violence n’est pas seulement aux portes du pays, elle s’est installée partout, même dans ce quartier branché. Et tandis que les jeunes citadins israéliens réagissent symboliquement et culturellement (raves ou création de tee-shirt contre l’occupation par exemple), les jeunes Palestiniens, ancrés dans la dureté du conflit, semblent plus prompts à réagir concrètement. Et c’est là que le film d’Eytan Fox s’imprègne d’un goût de manichéisme ambigu. L’ultra conservatisme de la famille palestinienne d’Ashraf se heurte à la modernité peace and love du cocon de Tel-Aviv. Le clivage réaliste entre le climat en Palestine et celui en Israël qui s’en dégage, propose une vision peut-être un peu trop israëlo-centrée de la question.

Le réalisateur signe néanmoins un film divertissant sur un sujet grave. L’originalité est là, n’allons pas chercher plus loin. « Cette bulle est selon nous un mécanisme de survie » expliquent Eytan Fox et son producteur. Gageons que seule la volonté de retranscrire l’ambiance déconnectée de « Tel-Aviv the Bubble » a animé le réalisateur israélien célèbre pour l’humanisme de ses films.

Bonus

La sortie de The Bubble en DVD est l’occasion pour Noam, Lulu, Yali et Ashraf, les héros, de s’inviter de nouveau dans les réflexions sur le conflit israëlo-palestinien, ou encore sur le regard de la société envers l’homosexualité. A peine le DVD lancé, l’affiche du film en version animée s’étale sur l’écran en guise de menu principal. Les bonus livrés avec le DVD : la bande-annonce du film, son making-off, les scènes coupées ainsi que le clip de la chanson The man I love d’Ivri Lider (qu’il interprète dans le film) s’annoncent assez classiques.

Le making-off est en fait extrait du reportage de Guy Pines pour une émission israélienne. Le journaliste s’est rendu sur les principaux lieux du tournage. Le reportage se concentre essentiellement sur la relation entre le quartier de Sheinkin Street de Tel-Aviv et sa représentation dans The Bubble. Les interviews de l’équipe du film et des habitants israéliens et palestiniens sont entrecoupées d’extraits. Rien d’extraordinaire dans les bonus, si ce n’est la découverte de la réalité de la population « yuppie », qui s’est créée dans la métropole, en contradiction avec le reste du pays.

A part côtoyer un peu plus longtemps l’univers du film, inutile de s’attarder sur les bonus. L’essentiel reste bien sûr l’œuvre courageuse d’Eytan Fox, agréable à voir ou à revoir.

Titre original : Ha - Buah

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Durée : 117 mn


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