Les Incorruptibles (1987) de Brian De Palma

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Sorti en 1987 sur nos écrans, Les incorruptibles de Brian De Palma nous plonge dans l´enfer mafieux des années 30 à Chicago.

La prohibition faisant loi, Al Capone et ses hommes en profitent pour s’emparer par tous les moyens du marché noir. Eliot Ness, jeune idéaliste, est chargé d’arrêter la contrebande d’alcool et donc de mettre un terme aux activités de Capone. Pour éviter la corruption généralisée qui règne dans la ville à l’époque, il s’entoure de quelques hommes soigneusement sélectionnés pour leur intégrité : les Incorruptibles.

De Palma, déjà coutumier du film de gangsters avec Scarface (véritable surnom d’Al Capone), s’attaque ici au mythique duel entre Al capone et Eliot Ness. Réalisateur baroque aimant les couleurs criardes et les décors tapes à l’œil (Carrie, Phantom of paradise, …), il retranscrit un Chicago des années 30 de carte postale. Les décors de studio sont trop beaux pour être vrais mais donnent à l’ensemble un côté « âge d’or » du cinéma américain. On se croirait revenu dans les années 40 au temps des Hawks, Capra et autres Wilder. De Palma fait du cinéma et ne s’en cache pas : décors rococos, costumes Armani (sauf pour Sean Connery) et casting 5 étoiles. Cette démarche, quoique parfois pompeuse, apporte un vent de fraîcheur par rapport à la vague de films réalistes qui inonde le marché actuellement.

De plus, malgré cela, l’identification aux personnages se fait naturellement. Leur ultra-caractérisation (Costner par exemple, est croyant, bon père de famille, respectueux des lois, vante les mérites du mariage, et sa femme lui met des mots avec son sandwich avant de l’inviter coquinement à monter lui coiffer les cheveux, ggrrrr) ne nuit pas à l’attachement qui se crée avec le spectateur. Sean Connery est poignant en père-mentor, Andy Garcia parfait en bleu gominé roi de la gâchette et même le méconnu Charles Martin Smith nous charme avec son côté intello-dévergondé-maladroit. Du côté des méchants, De Niro cabotine avec un plaisir communicatif et Billy Drago possède un physique de tueur psychopathe indéniable.

Le scénario de David Mamet est classique mais efficace. Si la structure narrative ne réinvente rien, elle a le mérite d’être très cohérente : exposition de la situation générale, mise en place de l’équipe des incorruptibles, premières grosses prises de ces derniers, vengeance des bad-guys et enfin victoire des héros. Si l’on sait où l’on va, les scènes clés du film restent poignantes par leur enjeu humain. La mort de certains personnages, situation logique et attendue, n’en reste pas moins intense en émotions. Ils nous semblent intouchables de par leur nom ( The untouchables en anglais) mais également par leur sympathie et l’équipe qu’ils forment.

 

De Palma derrière la caméra en fait comme à son habitude beaucoup. Si parfois il loupe le coche (Le dalhia noir, Femme fatale, Snake eyes,…), cette fois-ci la cible est atteinte. Il n’atteint pas les sommets tutoyés lors de Scarface mais il emballe les scènes importantes avec une certaine maestria. La mort de Malone (Sean Connery) filmée en caméra subjective comporte des erreurs narratives (mais pourquoi ne réagit-il pas plus rapidement ?) ce qui n’enlève rien à l’intensité. C’est d’ailleurs ce qui fait la force de sa mise en scène dans le cas présent. Il se concentre avant tout sur la mise en place de la scène plus que sur l’action en elle-même. Alors qu’il ne se passe rien de concret, le spectateur ressent la tension monter au fil des minutes : l’attente du dénouement tardif de la situation fait monter l’adrénaline. Lors de la fameuse scène de la gare (culte même si empruntée au Cuirassé Potemkine d’Eisenstein), Kevin Costner hésite à plusieurs reprises : doit-il aider cette femme et son bébé ou rester en place ? L’enjeu est autre mais De palma nous communique le stress de son personnage et ainsi nous implique dans le film. Quand l’action commence, l’intensité n’en est que plus grande car le spectateur est désormais comme un comédien qui rentre sur scène : le trac fait place à la réalité.

Les incorruptibles est un film bourré d’imperfections qui participent à son charme. Blockbuster assumé porté par un réalisateur atypique, ce film traverse les années en s’abîmant tout en se bonifiant. Le glamour de l’époque s’écaille quelque peu mais il en ressort une honnêteté, une pureté peu répandue de nos temps. C’était l’époque pas si lointaine où les grosses productions avaient de l’âme.

Titre original : The Untouchables

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Durée : 120 mn


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