Les Cinq secrets du désert (Five Graves to Cairo)

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Billy Wilder n’a pas toujours été le cinéaste indépendant que l’on connaît : il aussi dû travailler, à ses débuts en particulier, pour les studios. Les Cinq secrets du désert (Five graves to Cairo) fait partie de ses « films de commande ». Réalisé pendant la guerre (1943), clairement propagandiste (comment les Alliés ont pu […]

Billy Wilder n’a pas toujours été le cinéaste indépendant que l’on connaît : il aussi dû travailler, à ses débuts en particulier, pour les studios. Les Cinq secrets du désert (Five graves to Cairo) fait partie de ses « films de commande ».

Réalisé pendant la guerre (1943), clairement propagandiste (comment les Alliés ont pu vaincre Rommel en Afrique), Les Cinq secrets du désert part d’une idée relativement simple, pour ne pas dire déjà vue : un officier britannique se retrouve malgré lui dans un hôtel où débarquent les Allemands, dirigés par le Maréchal Rommel, et prend l’identité d’un valet mort quelques jours plus tôt. Mais le valet en question était en fait un espion, et l’Anglais se voit contraint de jouer double jeu, tout comme la servante française qui attendait elle aussi les Allemands…

De facture classique, le film aurait pu être un vulgaire film de guerre sans la « Wilder’s touch » : une direction d’acteurs remarquable, une écriture d’une grande finesse et une réalisation soignée. Ces trois qualités, communes à toutes les oeuvres de la filmographie du cinéaste, lui ont permis de réaliser un cinquième film qui traverse les âges sans trop vieillir.

Le trio vedette, composé de Franchot Tone, Anne Baxter et Erich Von Stroheim, est en effet mémorable : Tone joue les Anglais typiques, tour à tour cynique et à l’humour acide, sans sombrer dans l’excès. Anne Baxter reste convaincante avec ce petit accent français, déstabilisante dans son aversion pour les Alliés et se refusant de jouer les sentimentales comme aurait pu le supposer son rôle. Et surtout, il y a Von Stroheim, dont la simple présence électrise l’écran. Selon la légende, Von Stroheim, cinéaste maudit, proposa de nombreuses idées à Wilder concernant son personnage, et le résultat est là : un Rommel plus vrai que nature, froid, implacable mais pas tortionnaire, un poil arrogant mais respectueux, dont l’homosexualité latente est plus d’une fois sous-entendue. Pour compenser ce trio relativement dramatique (même si l’officier britannique à le sens du bon mot), Wilder propose un Akim Tamiroff angoissé et un Fortunio Bonanova en général italien à la créativité étouffée, tant comme militaire que comme chanteur d’opéra. Deux rôles comiques qui allègent le film.

Le film se distingue aussi par une psychologique plus poussée que dans d’autres films du genre. Certes, il y a bien quelques scènes de batailles et de bombardements, mais l’ensemble se déroule en huis clos, sous tension permanente, donnant au film une autre dimension et évitant le piège du « tape à l’œil ». L’humour distillé tout au long du film, qui transparaît surtout dans les dialogues, et le sens du détail sont les autres éléments caractéristiques d’un scénario dont la simplicité est rapidement occultée par une écriture peu commune pour l’époque.

Enfin, la réalisation de Wilder permet au film de tenir la distance : d’un noir et blanc remarquable (par ailleurs nominé aux Oscars), elle possède un rythme soutenu, constant, où les rebondissements se chevauchent à un rythme idéal et maintiennent le spectateur en alerte. Il y a bien entendu des erreurs de réalisme (les Allemands parlant anglais à leur espion ; un seul homme se lance à la poursuite du traître tandis que les autres soldats ne bougent pas…), mais on passe outre pour apprécier un film de genre réussi.

Titre original : Five Graves to Cairo

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Durée : 96 mn


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