Les Aventures extraordinaires d’Adèle Blanc-Sec

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Le retour de Besson cinéaste est plutôt une bonne surprise. La miss Blanc-Sec, transformée en Indiana Jones au féminin, évolue plaisamment dans une comédie d’aventures décomplexée. Destinée aux enfants, petits et grands.

Décidément, Adèle Blanc-Sec, rouquine peu badine, a plus d’un tour dans son sac ! L’héroïne frondeuse du rugueux Jacques Tardi permet en effet à Luc Besson, magnat français du cinéma commercial, de réaliser… allez… quoi… son meilleur long métrage depuis longtemps. Tout simplement.

Rythmé, soigné, divertissant sans être trop lénifiant, techniquement irréprochable (bien sûr), mais pas forcément tape à l’œil non plus : Les Aventures extraordinaires d’Adèle Blanc-Sec, adaptation des tomes 1 et 4 de la saga, donne à voir comme la synthèse de l’univers mental et esthétique du sieur Besson. Une densité bénéfique, que l’on soit groupie ou pas… Car ce film, évidemment destiné au grand public, manie de façon presque modeste – un ton en dessous, en tout cas, par rapport aux opus précédents – clins d’œil cinéphiles, courses-poursuites amusées, effets spéciaux accomplis, personnages grotesques et blagounettes (inégales il est vrai). Nulle démagogie facile : c’est dire si la petite feuilletoniste féministe, celle-là même qui caracole dans le Paris de 1912 nantie de jupes et de chapeaux extravagants, revient de loin. A tout point de vue.

Inattendu

De fait, la rencontre entre la "Besson incorporated" (scénariste, producteur, réalisateur, distributeur, co-fondateur d’EuropaCorp, etc.) et l’univers libertaire, très documenté, de Tardi semblait, a priori, improbable, sinon déraisonnable. Nul ne s’étonnera, d’ailleurs, que le côté sombre d’Adèle ait été lissé sur grand écran. Si la bande dessinée, foisonnante, la relie, incidemment, aux forces obscures qui agitent l’Europe à la veille de la Première guerre mondiale, le film, lui, préfère investir le seul terrain de la comédie d’aventures. Cible enfantine oblige, on imagine mal le cinéaste du Grand bleu s’acoquiner avec la bande à Bonnot, par exemple… Et qu’ils soient grands ou petits, les bambins, d’ailleurs : Luc Besson n’ayant jamais caché qu’il était son premier spectateur. En cela, il a beau claironner, fiérot, être resté fidèle au grand Tardi – le maître, en effet, l’a adoubé – il est surtout fidèle à lui-même ! Mais curieusement, c’est aussi pour ça, au fond, que son film, débonnaire, coloré, décomplexé, fonctionne.

Parce qu’il se fait clairement plaisir, le barbu souvent bougon, lorgnant généreusement du côté de ses héros définitifs (Tintin et Indiana Jones), tout en s’appuyant (pour une fois) sur une histoire dynamique, riche en rebondissements, habitée par des personnages hauts en couleur ! Quand bien même tout cela est parfaitement invraisemblable, évidemment : le genre, dont il maîtrise parfaitement la grammaire, lui donne tous les droits de toute façon. Intrigue dense et multipistes. Décors exotiques sans être aveuglants. Dramaturgie assez fluide (sauf que l’on perd le méchant, génialement incarné par Mathieu Amalric, en cours de route, dommage…). Morceaux de bravoure… Tout y est, jusqu’aux citations directes : c’est peu dire que Besson rend hommage à Spielberg (un peu aussi à Jeunet).

Alors, joueur et gagnant, Luc Besson ? Le choix de la sémillante Louise Bourgoin, pour incarner son Adèle de cinéma, relève en effet du pari. Pas tout à fait gagné, cela dit… C’est peut-être là que le bât blesse. On comprend bien ce que l’ex-miss météo de Canal + peut ajouter, par rapport au personnage originel, en termes de séduction et de connivence avec les spectateurs, puisque tel est le parti-pris de la mise en scène. Le souci, c’est que son jeu, d’une raideur un peu forcée, s’apparente encore à celui de ses sketches à la télé. La gouaille futée d’une Sylvie Testud aurait, peut-être, sonné plus juste. Plus ample, surtout. Rien de grave : la fin du film est juste assez ouverte pour que l’on imagine un "retour de la revanche, part II" un jour ou l’autre. Il y a encore tout plein de jolis albums de la miss Catastrophe à adapter, sinon à colorier… La jeune actrice a donc tout le temps d’affiner ses postures et son bagout. Et nous, de nous replonger avec délice dans les bulles de papier de Tardi. Les seules, les vraies, qui enivrent tout à fait…

Titre original : Les aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec

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Durée : 107 mn


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