We Want Sex Equality (Made in Dagenham)

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Entre comédie molle et drame social policé, comment générer peu d´émotion avec une histoire forte et émouvante.

Nos amis cinéastes british savent généralement traiter une problématique sociale par le biais d’un humour poétique et dévastateur, saupoudré d’un supplément d’âme permanent. A l’inverse de The Full Monty ou Les Virtuoses, We want sex equality loupe le coche maladroitement, ne dépassant jamais le cap de la tendre comédie sympathique. Le film bénéficie pourtant d’un sujet pertinent et toujours d’actualité, l’éternelle inégalité des salaires homme/femme, en s’inspirant de l’histoire vraie de la première grève d’ouvrières de l’usine Ford de Dagenham (Angleterre profonde) en 1968. 183 grévistes insouciantes mais déterminées à obtenir le salaire qu’elles méritent, qui iront jusqu’à boire le thé avec la secrétaire d’Etat de l’emploi, bloquer indirectement 30.000 ouvriers et faire perdre à Ford jusqu’à 8 millions de Livres. Chapeau bas mesdames.

Le film se concentre sur le personnage de Rita (Sally Hawkins), ouvrière banale qui se découvre des talents de leadership insoupçonnés et mènera la fronde jusqu’à son but, quitte à abandonner, le temps de la lutte, mari perdu et enfants mal coiffés. Elle génère autour d’elle un petit groupe de femmes qui offre au film ses moments de comédie et d’émotion durant ce combat fragile et fastidieux. Malheureusement, ces scènes ne sont jamais à la hauteur du sujet prometteur. En minimisant les risques et son degré de créativité, le film aborde dangereusement la limite qui le sépare d’un bon téléfilm sans saveur. Les comédiennes portent solidement le film sur leurs épaules, mais cela ne suffit pas à transcender le récit. Toujours hésitant à percuter et élever le propos, le réalisateur ronronne entre humour léger et portée politique quasi-inexistante. Frustrant.

Qu’ils soient maris, patrons, ouvriers ou représentants syndicaux corrompus, derrière le conflit salarial avec Ford, le film tente timidement d’aborder une certaine opposition perpétuelle entre femmes et hommes sans éviter la caricature. Peut-on magnifier les femmes sans dévaloriser les hommes ? L’homme est ici stupide, représenté par le mari de Rita qui, sans la présence de sa femme, ne sait évidemment pas faire cuire un œuf, coiffer sa fille ou laver une chemise. Certes, cet homme existe mais décrédibilise le propos. Les hommes dominent car, justement, ils ne sont pas débiles. Le film oublie certains fondements du sexisme, tels que l’angoisse de la perte du pouvoir et la peur fébrile face à la force de la gent féminine, qui sont trop légèrement évoqués. Il abandonne aussi son personnage le plus intéressant : cette mère au foyer surdiplômée frustrée, obligée de servir la soupe à son mari, montrant l’extrême absurdité de la situation et résumant presque à elle seule le vrai combat de l’époque.

Chaque lutte a ses dommages collatéraux. We want sex equality a le mérite de bien observer les conséquences d’un tel évènement dans le quotidien de ces femmes, en évoquant finement leur gestion de leurs nouvelles responsabilités et l’évolution de leur mentalité, mais ne montre finalement que très peu d’instants réels de combat. En se focalisant sur les chamboulements du quotidien et une critique de l’homme pré-moderne, il évite tout traitement sur les véritables responsables des inégalités salariales, les patrons et responsables politiques. Le film se perd et choisit les mauvaises directions, offrant malgré tout une lucarne sur un pas important dans le combat pour la parité, initié par de simples ouvrières apolitiques.

Titre original : Made in Dagenham

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Durée : 113 mn


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